Déplacements interdisciplinaires

Début de collaboration avec Unai depuis dimanche. Nous avons mis au point un protocole d’enquête commun, pour collecter différentes données sur les représentations des habitants du centre ville de Tarragone sur le quartier de Campo Claro. 

Si notre protocole est le même, nous ne cherchons pas à obtenir les mêmes données. En effet, le projet d’Unai était de collecter des représentations visuelles, qui puissent ensuite être dessinées par ses soins dans une optique de portraits robots des gens du quartier, tandis que pour ma part je cherche toujours à collecter les discours sur l’espace ségrégué que semble être Campo Claro, puisque mon travail est toujours orienté autour des questions d’influence de l’espace sur les identités au sein du quartier, et c’est en ce sens qu’il me semblait pertinent de traiter également les identités attribuées par les résidents du centre ville sur l’espace de ce quartier.

Dans ce que nous proposons, Unai pense que le motif de l’étranger ignorant sur les pratiques est pertinent pour recueillir des mises en mots  plus claires, et qu’il est donc préférable que ce soit moi qui pose les questions ; idée que je partage puisque je pense en effet que cela atténue l’impact de la tendance à la hiérarchisation face au chercheur, qui provoque souvent de l’hypercorrection.  La personne interrogée est donc la seule détentrice du savoir empirique qu’elle détient, ce qui peut réduire sa méfiance.

Ce dispositif propose donc un chercheur, un interprète (Unai), et une documentaliste (Gabriela). Il est en effet important pour Unai que  ces entretiens soient filmés, afin qu’il puisse en retirer un univers visuel. Alors que nous considérons souvent en sociolinguistique que l’anonymat est essentiel au déroulement le plus désubjectivé possible des entretiens, il s’avère que la caméra amène une autre dimension pour ce type d’entretien, puisqu’elle semble légitimer l’interaction pour ceux qui sont interviewés, alors même que les productions discursives varient et que les mises en mot qui peuvent paraitre les plus ségrégantes semblent assumées.

Ce travail interdisciplinaire nécessite et opère de facto des déplacements dans nos deux pratiques – artistiques et scientifiques-. La rigueur que demande un protocole de type sociolinguistique n’est pas toujours de mise dans notre travail, et ce parce que :

1 – Les questions changent parfois d’un entretien à l’autre (maitrise de la langue très approximative), parfois nous avons des entretiens en groupe, parfois en privé, les questions ne sont pas posées dans le même ordre.

2- Parce qu’il arrive que Unai influence les réponses que nous obtenons en proposant des alternatives aux réponses trop vastes qui nous sont faites, et ce dans l’optique de pouvoir obtenir le matériau nécessaire à son travail.

Néanmoins le travail interdisciplinaire, qui plus est avec un artiste originaire de Tarragona m’a permis de recueillir des informations qui me paraissent aujourd’hui capitales concernant l’identité catalane et celle(s) du quartier, et qu’il m’eut été impossible de mettre à jour sans le travail collaboratif avec Unai. Ces entretiens entrainent donc un changement radical de questionnements pour moi au niveau sociolinguistique puisque, même si l’espace du quartier de Campo Claro est souvent déclaré dans nos entretiens comme de Tarragona (question 14), nous n’avons obtenu qu’une seule réponse affirmative (sur huit entretiens pour le moment) à propos de l’appartenance catalane des gens du quartier (et par réponse affirmative j’entends une réponse non nuancée concernant la globalité du quartier, puisque nous avons obtenu des réponses mi affirmatives mi négatives avec modulations en fonction du pays d’origine imaginé). C’est donc pour moi un nouvel enjeu de taille sur lequel je compte développer un travail plus approfondi – nous en reparlerons dans un autre article-

Notre trame d’entretien est la suivante :

 1) ¿Donde está Campo Claro?

 2) Ella está buscando un piso para vivir, Campo Claro es más barato. Pero antes quiere asegurarse de que es un buen lugar para vivir ¿Se lo recomiendas?

 3) ¿Que tipo de gente vive allí?

 4) ¿Son Catalanes?

 5) ¿Que idioma hablan?

 6) ¿Que se puede hacer en Campo Claro?

 7)  ¿Que es una “juani” o “choni”?

 8)  ¿Hay chonis en Campo Claro?

 9) ¿Que es eso de “tener duende”?

 10)  ¿La gente de Campo Claro tiene duende?

 11)  ¿En que trabaja la gente de Campo Claro?

 12)  ¿En que se diferencia la gente de Campo Claro y la gente del centro de la ciudad?

 13)  ¿Para ti, Campo Claro es Tarragona?

 14)  ¿Porque la gente del centro de la ciudad y la gente de Campo Claro hablan como si fueran de lugares diferentes (por ejemplo : voy a Campo Claro / Voy a Tarragona como si fuera otra ciudad?)

 15)  ¿Conoces alguna persona que viva en Campo Claro?

 16)  ¿Donde vives?

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